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Carnet de doute

La maison griots

 

Editions Dagan

170 pages - 15 euros

 

« Partir, c'est se chercher ailleurs. On ne part pas en Inde pour les mêmes raisons qui nous font partir en Afrique ou dans la Forêt Amazonienne. Je parle en connaissance de cause. Par contre, j'ai rencontré sur ces trois continents (l'Inde est un pays-continent, l'Amazonie est une forêt-continent) des Européens qui se cherchaient. Et dont certains se perdaient. Peut-être parce qu'ils avaient trouvé ce qu'ils cherchaient.

 

J'ai développé en Amazonie une étrange aptitude. Au cours d'une expédition sur l'Alitany avec mon ami Aïku, j'ai eu un jour l'intuition que si je voulais pleinement le comprendre, il fallait que je laisse tomber mes préjugés de palassissi, que j'accepte totalement ce qu'il me disait et que, dès lors, les légendes dont il garnissait ses récits n'étaient pas des mythes, mais la réalité. Mais j'ai heureusement eu une autre intuition : si je ne voulais pas sombrer dans la folie, il me fallait préserver une part consciente, analytique, de même que Dostoïevski gardait toujours une partie de son esprit en observation pendant ses crises d'épilepsie, ce qui lui a permis de les transcrire avec une puissance d'évocation unique.

 

Ce carnet est celui d'un homme qui n'a malheureusement développé qu'une seule de ces deux aptitudes. C'est une fiction, avouons-le, mais qui prend sa source dans la plus intime des réalités. C'est le récit d'une implosion. Â»

 

Avant-propos de Carnet de doute

Un carnet de route devient un fil des pages un carnet du doute : le pourquoi du voyage, le pourquoi des rencontres, le pourquoi du moi, chamboulé par les miroirs de la pérégrination, l'acculturation qui devient perdition. Le voyage du narrateur de Carnet de doute est un aller simple. Parce qu'il s'arrête. Parce qu'il ne revient pas. C'est le carnet d'un idéaliste qui n'a pas pris la mesure du voyage qu'il entreprenait. Parce qu'il l'ignorait. Parce que le vrai voyage n'est pas géographique.

 

Un jeune metteur en scène stoppe sa route au Sénégal pour monter un projet brinquebalant avec une troupe d'artistes improbables : des griots mystiques, un danseur acrobate et une danseuse-meneuse qui ne sait que peu danser ni même mener. Tous attendent dans la moiteur d'une case isolée du monde d'autres artistes, qui n'arrivent jamais. Les séances de thé s'enchaînent et dans les récits qui défilent au rythme des joints, le narrateur plonge dans l'épopée de Soundiata et une idée lui vient en tête : mettre en scène l'histoire d'une troupe qui souhaite monter un spectacle sur Soundiata. Mise en abyme qui devient au fil des jours – et des nuits – le propre abîme dans lequel se perd l'esprit de celui dont les mots tracent la déroute. Le carnet est le fil d'un voyage intérieur qui devient l'ultime voyage : dissolution des frontières entre réel et mythe, confusion des sources dans un esprit qui implose, à l'image d'une écriture qui se disloque également.

 

Ce carnet est un roman. Mais il naît d'un carnet véritable. La fiction devient la seule façon d'exprimer une réalité qui échappe à la raison. De dire l'indicible, ainsi que l'évoque Philippe Forest dans son essai Le roman, le réel : « Ce qui reste alors du roman, c'est, une fois enlevés les artifices et la fiction, le réel qui lui a donné sa nécessité. Â» La forme épistolaire nous plonge d'autant plus dans le chaos du narrateur.

 

Le voyageur qui s'explore au contact de l'Afrique s'expose toujours : c'est un voyage difficile, risqué, qui exige de vrais garde-fous. Je parle du vrai voyage, celui qui s'accompagne d'un voyage intérieur. Il est aux quatre coins de la planète des parts de nous qui nous attendent. Il est alors nécessaire de ne pas oublier qui nous sommes. L'art du masque est parfois fatal lorsqu'on omet que le masque est une part de nous, qui n'est pas nous.

 

L'écriture est un voyage. La lecture en est un. Proposer au lecteur une fiction-voyage qui prend sa source dans un voyage intime c'est, sans en dévoiler son intimité, en faire sentir l'essence. Voici le but de ce Carnet de doute. Les trois poèmes qui le jalonnent sont les trois piliers du recueil L'ombre chue des faux soleils, lauréat du concours "Eclats de vers en transe", concours international de poésie du Niger 2007.

ROMAN

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